vendredi 19 octobre 2012

Pas si " Savages" que ça!


Vous vous souvenez quand vous avez vu pour la première fois Pulp Fiction ?
Pumpkin' :"Everybody be cool, this is a robbery!"
Honey Bunny: "Any of you f**kin' pricks move and I'll execute every motherf**king last one of you!"

Vous pensiez soudainement entre deux scènes décousues et bavardes «  Mais qu'est ce que c'est ? Qu'est ce que je regarde ? » et puis «  Mais, j'aime ça en plus ! »


C'est que vous découvriez le Pulp, à savoir ce mélange pas sérieux mais violent et exagéré de vies qui s'entrechoquent quasiment au hasard, et ce, dans des lieux exotiques et clichés. ( Allez trouver une personne qui vous le résume en une phrase!)

Sans jamais pouvoir rivaliser sur aucun aspect avec le film légendaire de Tarantino, «  Savages » d'Oliver Stone, c'est ça.


Une bande annonce bien comme je les aime.

Prenez un trio plus que complice, car clairement polyamoureux, vivant proche d'un paradis tout californien. Ben, Chon et O cohabitent sous la chaleur et se laisse bercer par la richesse que leur fournit leur lucratif commerce de Marijuana. C'est chaud et moite, si vous voulez. 
Refusant de faire affaire avec ses salauds capitalistes du Cartel, ils se mettent à dos la "Reina" Elena et son bras droit complètement pervers Lado. Pour les faire plier, ces derniers enlèvent la belle O mais ses deux amants résistent. Manu militari.

Le pitch est d'une simplicité telle qu'on se demande ce qui est passé par la tête de Don Winslow  dont  l’œuvre est adaptée au cinéma. Ou plus exactement ce qui ne lui est pas passé par la tête.

Mais au fond, princesse en danger et prince valeureux à la rescousse, ça fonctionne, alors on dira rien. (L'originalité est qu'ici il y a deux princes qui coopèrent!)
Du coté d'Oliver Stone ( qui renoue avec le film de gangster au second degrés après le bon U-Turn), rien à dire, la réalisation est idéale et l'ambiance côte ouest brûlante est bien reconstituée.


Une grosse erreur, au milieu de cet amas de personnalités délicieusement fêlées ( normales donc si l'on retient mon interprétation Pulp), c'est O. Pas tant le personnage, déjà formidablement uni-dimensionnel, mais l'interprétation.
Hélas, Blake Lively et ses robes de bronzette oscillent entre le comateux et le foncièrement ridicule.
Et là, on a un énorme défaut du film :si l'histoire est racontée du point de vue des protagonistes, qu'est ce que Stone nous a fait avec son oie blanche arrachée à son nid douillé ?
Habituez-vous à cette expression,
Vous allez ne voir qu'elle pendant 2h.

Blake ne donne absolument aucun relief à son personnage et la voix off est proche de l'insupportable.
La perte de l'innocence étant le thème sous-jacent, on s'attendait à la voir dépassée, effrayée...mais pas niaise, irresponsable, quasi indifférente quand elle devrait être bouleversée !

Quelle sorte d'héroïne ne vous fait pas vibrer un seul instant ?
Tandis qu'elle débite son texte, on ne peut s’empêcher de se demander si elle est un jour redescendu de sa consommation de cannabis.

Les dialogues ne l'aident pas vraiment avec des phrases du genre «  Et tu t’étonnes d'avoir des problèmes de concentration ?», « Elle tiendra pas deux semaines » et autre « Je-vais-faire-des-emplettes-alors-que-vous-m'avez-expliqué-qu'on-s'est-mis-le-cartel-à-dos. »

Au fond, notre joli trio n'est fusionnel que dans la mesure où elle est « utile » aux garçons qui la garde comme un animal de compagnie, ils ont beau répéter qu'ils l'aiment...on accroche pas.
La passion n'est pas assez présente, l'histoire d'amour devient aussi superficielle que O. C'est dommage.

D'autant plus que les gars, eux, se débrouillent bien !
Respectivement, Taylor Kitsch en ex-GI traumatisé et violent (Chon) et Aaron Johnson en hippie post moderne orienté dealer humaniste (Ben). 
Hey, les filles, Ben c'est Kick-Ass...Voilà, vous aussi.

La tête et les jambes!
Devinez qui est qui!
Un indice: l'armée n'autorise pas les cheveux longs! ^^


Bien sûr, j'aurais aimé un peu plus de passion mais leur relation est bien décrite et les interprétations, très résignée pour le premier et ostensiblement choquée pour le second, sont ce que l'ont peut attendre de jeunes hommes en pleine tourmente.
Leur amitié a bien plus de force que l'histoire d'amour sensée être le moteur de l'histoire.
Il y a plus de sentiments dans le «  Est ce que je t'ai  déjà dit que je t'aimais, mec ? » de Ben à Chon avant l'assaut final que dans les trois scènes de sexe avec leur blonde ! ( pudiquement coupées en plus!)

J'en profite pour dire que Ben est probablement le seul personnage auquel on peut s'identifier, et que c'est hautement satisfaisant de voir enfin une réaction humaine face à ce déchaînement de violence.

Meilleur dialogue du film.
Du côté des "vrais trafiquants", il y a la superbe Salma Hayek en reine de cartel aux abois, à la fois d'une cruauté calculée et d'une fragilité réelle. Il est difficile de pas la prendre en pitié par moments.

Ce qui n'est pas le cas de son bras droit, Lado ( Benicio Del Toro, dégoûtant à souhait) qui reste l'une des pires raclures que j'ai eu l'occasion de voir.
Il est un atout majeur du film !
Leur dynamique est excellente, leurs échanges tendus sont un vrai plaisir de spectateur.


Un mot de Travolta en agent véreux du FBI....on en a dit, on en a écrit, sur son charisme et son retour en force...oui, les gars, si vous voulez..personnellement je trouve qu'il remplit son rôle très secondaire et qu'il met à profit ses quelques minutes d'apparitions. Ce sera tout !

Le film reste un bon moment de délire assumé par tout le monde avec des explosions et des morts, des répliques volontairement idiotes mais franchement marrantes.

Ça fait du trash et de la provoc ' ( Encore que franchement, qui est choqué par un ménage à trois, désormais ? Vous ? Vous ? Vous, monsieur en soutane au fond ? Non plus...Ok!)


Et malgré un ou deux dialogues superflus, on s'ennuie pas du tout. C'est écrit et filmé comme un divertissement, alors divertissez-vous !
Personnellement, je le reverrais..ne serais-ce que pour Ben et Chon !

Je vous ai mis la partie suivante entre "parenthèses" pour les spoilers , vous pouvez à nouveau lire après la seconde bannière.


Au final, si l'on reprend mon choix d'interprétation, tout ce beau monde se croise et s’entre tue pour  quelques minutes de plus de bonheur terrestre ( par l'argent, la drogue, l'amour, le pouvoir ou le sexe..au choix).

Et tout le monde est très déçu..parce que la vie c'est plus Harlan Coben que Pandi Panda.

Sauf que pour nous donner cette bonne leçon des choses Oliver Stone (et Winslow, l'adaptation est fidèle sur ce point) se prend les pieds dans le tapis en faisant survivre nos héros (certes) et en leur permettant de reprendre leur vie de bohémiens aux mœurs consensuelles.
O a beau nous dire que plus rien n'est pareil, nous, on le voit pas. C'est dommage, encore une fois.


A la question, « mais qu'est ce que je regarde ? », on peut répondre « un film de gangster pas sérieux et volontiers caricatural sur la dure réalité de la vie. »
Mais Drac ? Tu te fous de nous ?
Oui, mais c'est Oliver qu'a commencé !

 Vous vous fichez éperdument de savoir que:
  • Le terme "Savages" est utilisé par chacun des deux camps pour décrire l'autre: le cartel d'Elena car ils se retrouvent face à deux types qui ne comprennent ni la méthode douce ni celle forte et font preuve d'un manque de respect à" l'ordre établi". Les garçons, pour décrire la sauvagerie des méthodes de l'ennemi, au sens de brutes sanguinaires. Les deux représentant en réalité un simple aspect de la définition totale (et académique) que nous en donne O en guise d'épilogue.
     
  • Blake Lively n'a été castée qu'à défaut, après la défection de  Jennifer Lawrence... et ça se sent!
     
  • Tous les décors du film sont des extérieurs californiens ou des propriétés existantes. Pas de studios pour Oliver Stone!  Seul inconvénient: le risque d'incendie dans les scènes d'action a rendu certaines journées de tournages par 35°c à l'ombre, terriblement dangereuses.
     
  • Manière de faire un clin d’œil encore plus marqué au Pulp façon Tarantino, Uma Thurman devait jouer la mère de O. Les scènes furent coupées car inutiles et trop longues.
     
  • Winslow a  écrit une préquelle qui deviendra éventuellement un film. Intitulée " Kings of Cool" elle revient sur la vie à trois de nos chers héros ainsi que sur la mise en place du business de l'herbe.  



    Maintenant c'est le bon moment de regarder Pulp Fiction...
    Drac

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