dimanche 29 septembre 2013

C'est presque chaud: Low Winter Sun.

J'ai dû attendre un moment pour faire cet article. Car il n'est pas toujours facile de se mettre dans un polar. Encore moins quand celui-ci semble rempli de personnages totalement déconnectés les uns des autres.
Et puis, en s'accrochant, ça devient plus lisible, certes toujours un peu brouillon, un peu bavard, un peu lent mais tellement, tellement intelligent.

Voici que les américains (et moi-même) découvrent « Low Winter Sun ».


Le Tv-Show de l'AMC (Breaking Bad, The Walking Dead, Mad Men) est un drama, très sombre aux relents à peine masqués de «The Wire».
Sans atteindre le niveau de sa consœur, il s'agit là aussi pour une bande de flics de résoudre une enquête mafieuse aux multiples ramifications tout en tentant de maintenir leur vie personnelle à flots. La nouveauté réside dans le fait que le duo principal n'est pas très motivé pour découvrir l’assassin.
Et pour cause, ce sont eux les coupables.

Explications :
Whoopsie!
Frank Agnew (Mark Strong!!), submergé par le désir de vengeance et la certitude que l'un de ses collègues est pourri, décide de le supprimer avec l'aide du partenaire de la victime : Joe Geddes (Lennie James).
Maquillant son crime en suicide, il ne s'attend pas à découvrir que ledit collègue était en réalité l'objet d'une enquête de la police des police, menée d'une main de maître par l'officier Boyd. (David Costabile, Hardman de Suits)
Il se retrouve alors obligé d'enquêter sur le meurtre dont il est lui même coupable et d'élaborer au fur et à mesure une nouvelle stratégie pour cacher son geste. D'autant que le reste de la brigade devient suspicieuse et Joe se revèle bien moins fiable que prévu.

Chris Mundy, connu pour ses collaborations sur "Criminal Minds" et "Hell on Wheels", adapte ici la mini-série éponyme anglaise de 2006 qui avait plus impressionnée par sa cinématographie que par son sujet.

Mark Strong, qui est, selon moi, l'un des acteurs les plus sous estimés qui soient, y reprend son rôle et déambule, l'air brisé, dans une ville de Detroit obscure et en pleine déliquescence.
Oui...on se fend la poire dans Low Winter Sun.

Les flics troublés se regardent dans la glace et ne se reconnaissent plus:
n°11-a du manuel du petit polar.

Si le thème du flic à la dérive, devenant lentement paranoïaque et perdant pied est trop éculé pour vous (ce que je concède!), passez votre chemin, là, maintenant, de suite, car on va mettre les pieds dans la fange de l'humanité!

Les dix épisodes racontent la lente perte de contrôle d'un homme qui se croyait jusque-là intègre et bon dans son métier.
Mark fait un job formidable comme à son habitude même s'il joue «Toujours un peu pareil, toujours le même type de gars».
Pour le voir à son apogée, n'hésitez plus, regardez plutôt «The Long Firm».
J'avoue qu'ici, le gros souci...c'est que je n'aime pas Frank...c'est plus fort que moi, je n'ai aucune sympathie pour le personnage principal, ce qui rend, par moment, sa storyline un peu insipide. Ceci n'ayant aucun rapport avec l'interprétation, bien sûr.

Non, le vrai plaisir se trouve franchement là où on l'attend le moins : la performance de Lennie James en Geddes est, par exemple, digne d'un Emmy. Rare sont les personnages qui vous auront à ce point inspiré mépris ou colère, ou ayant incarné tout à tour la faiblesse, la ruse et la duplicité avec autant d'aisance.

De même, il me serait dur de ne pas mentionner le couple de voyous « Callis » dont l'implication d'abord vague, se renforce à mesure que l'étau se resserre.
Maya (Sprague Graygen) est intelligente, déterminée, lucide. 
Damon, son mari  est à la fois ambitieux, malin et professionnel.  Il est incarné par James Ransone dans son meilleur rôle depuis ses début dans" Ken Park" où il vous avait traumatisé, allez, mentez pas!
A eux deux, ils volent à coup sûr le cœur du public malgré leur statut de gangsters.
( Je vais d'ailleurs militer pour un spin-off sur leur rencontre...ça a dû être épique!)

Et encore, accordons un immense "Bravo!" au lieutenant Khalil (Athena Karkanis), qui en tant que femme flic de tv-show, n'est ni stupide, ni manipulable, ni faible, ni mère divorcée et débordée, ni une bombe sexuelle, ni même faux-mec et parvient encore à être un pivot principal! Comme quoi, messieurs les scénaristes...on peut le faire!

Les nominés dans la catégorie "Pour le meilleur et surtout pour le pire..."

Par ailleurs, la série pose en permanence la question de savoir qui est bon, qui est mauvais et joue agréablement sur le déshonneur et la trahison. (Ça, je vous l'accorde c'est pas nouveau, du tout.)

L'atout ultime, je dirais que c'est l'univers.
Il faut sérieusement un long moment pour y accrocher. J'ai attendu le quatrième épisode pour enfin adhérer à l'ambiance lourde, aux plans interminables sur la ville, à l'aspect fantomatique des lieux, aux silences presque gênant des scènes.
Mais tout ceci participe d'un scénario qui, s'il est dans un premier temps extrêmement confus, se révèle être le plus abouti que j'ai pu voir depuis longtemps.
Si je répète que tous les personnages sont habiles et multi-dimensionnels, c'est parce que l'intrigue l'est.
Pensez à ces dialogues raffinés entre complices se détestant mais obligés de collaborer, à la réinvention permanente du «crime» imaginé par Frank pour couvrir ses traces, et à cette scène hallucinante "d'attrapage de balle au bond" lors des interrogatoires du gang de Callis.
Oui, Low Winter Sun est un bon vieux polar, somme toute classique dans son développement, mais c'est un BON vieux polar.

Une série très noire, pas pour tout le monde, qui peut rapidement gonfler si on ne prête pas une attention particulière aux détails.
Je vais m'arrêter là parce que...je vais vous spoiler, c'est sûr. Tout est secret là dedans!
A tenter !

Vous vous fichez éperdument de savoir que:
 
  • Le générique de la série, écrit tout spécialement pour cette occasion est un bijou. On y voit une légende de la Soul, Bettye LaVette, y interpréter en personne "Huslin' in Motor City".



  • La série, qui avait commencé assez fort, a rapidement dégouté les audiences américaines par son manque total de moralité et ses séquences de longs dialogues. Hélas, elle risque de ne pas être renouvelée malgré son retour en grâce maintenant qu'elle a trouvé son public.
 
Les flics troublés regardent aussi
dans le vide (de leur existence). 

n°14-d
  • Comme les séries "The Wire" et "The Shield", l'action est intimement liée à la ville dans laquelle elle prend place, celle-ci en devenant presque un personnage à part entière. Vous entendrez donc énormément de vocabulaire en rapport avec Detroit: ainsi les disputes régulières entre partisan de "l'Americain" et ceux du "Lafayette" dans un "Coney". Il s'agit de deux modes de préparation de hot-dogs dont les habitants de Detroit sont très fiers.
 
  •  De même, une communauté nombreuse d'irakiens vit dans la ville de Detroit et y sont généralement nommés "Chaldéens" par la population. C'est le cas de l'inspecteur Dani Khalil.(Au grand étonnement de votre chère obligée qui comprenait rien aux descriptions initiales).

 
  •  James Ransone est un héros décoré. Hé, ouais! Il a sauvé une femme de son voisinage d'un viol, il y a de ça quelques années. Il a reçu une médaille civile pour son geste et des remerciements de la police.
    Il aurait rattrapé l’agresseur en fuite au prix d'une traversée de vitrine en verre dont il garde des séquelles à l'épaule!
 
 
 
 
"No dice" Pas question!
 Drac

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