mardi 28 janvier 2014

Da Vinci's Demons: History is a lie!


Il existe des séries comme des charognards. Elles attendent que vous soyez en état de faiblesse pour attaquer.
C'est le cas de tout ce que vous pouvez voir sur le câble avec la STARZ.
Et je ne suis pas vraiment objective non plus : je regarde quasiment toutes les séries de la Starz.
J'ai beau être consciente de la surenchère d'obscénités, de la gratuité de scènes de sexe, de la qualité «VSD» des décors et des costumes, des répliques qui tombent souvent à plat et des scénarios tirés par les cheveux, je re-gar-de.

Il faut croire que j'ai un appétit coupable pour le sensationnel racoleur.
Starz, mes bouquins Arlequin à moi.
Je vais vous présenter la dernière qui m'est tombée sous les yeux, un soir de désespoir. Ôtez votre cerveau, laissez-vous bercer par le ronron pas si désagréable du divertissement facile.

Ce que j'aime c'est qu'ils te mentent même pas.
Tu vois la promo, tu sais!
Da Vinci's Demons est donc l'une des dernières nées de la machine à fantasmes américaine, issue de l'esprit du très "hype" David S. Goyer. (à qui l'on doit les scénarii de "Blade", de "Flashforward", et plus surprenant, de "The Dark Night" et "The Dark Knight Rises")
Comme son nom l'indique, il s'agit d'une réinterprétation de la jeunesse de Léonard de Vinci dans une Florence updatée et «tellement plus fun» de la fin du XVème siècle.

 Premier problème: Ce qu'on y voit pousserait tout historien digne de ce nom au suicide!
(Bien que force est de constater que certaines de leurs idées sont avérées : Leonardo était plutôt super beau et cool, par exemple.)
Mais au fond, un peu comme pour Spartacus, le fer de lance de la Starz, on ne s’embarrasse pas longtemps de ce détail.

Attention, fil rouge de l'histoire :

Leonardo Di Piero Da Vinci, peintre et inventeur génial quoique rebelle, célèbre la liberté et le plaisir dans son atelier de Florence quand un homme mystérieux lui révèle qu'un grand destin s'offre à lui : Il est l'héritier d'une secte visionnaire nommée «Sons of Mithras» et doit accomplir sa destinée en guidant l'humanité vers nouvelle ère où la science règnera!
En retrouvant le «Book of Leaves», qui contient tout le savoir humain et même des œuvres avant-gardistes, il changera la face du monde. Ce faisant, il se met rapidement à dos les forces obscurantistes du Vatican qui souhaitent étouffer toutes formes de progrès. (Et tant qu'à y être, faire revenir la cité des Médicis dans le giron de la Sainte Eglise Catholique).


Toute ressemblance avec un certain best-seller mondial et conspirationniste écrit par Dan Brown est ici évidemment fortuite.
Bon, si vous pouvez avaler ça, vous avez fait le plus dur du chemin. Le reste ce sont des torses nus, des filles faciles, de gros délires technologiques, des anachronismes volontaires et pas mal de fun qui mange pas de pain.

Tom Riley incarne ce Da Vinci à la mèche parfaite, au sourire Colgate et aux petites phrases qui font mouche, du mieux qu'il peut. Et c'est pas si mal. Je veux dire par là que faute de nous convaincre d'une intelligence faramineuse, il fait un Da Vinci pour lequel il n'est pas difficile de rouler. A défaut d'en faire un personnage réellement tourmenté (comme tout bon génie de télé), il est suffisamment spontané et moqueur pour ne pas vous fatiguer.

Ce joyeux drille vaguement auto-destructeur a réussi à se faire des amis fidèles qui forme une clique attendue de seconds rôles hauts en couleurs.
 
Vous avez Zoroaster, voyou professionnel, pilleurs de tombes à ses heures, dont on ne sait pas trop s'il est juste très seul ou si Leo lui doit beaucoup d'argent parce qu'il marche dans toutes les combines du peintre!
(Oui, il s'appelle Zarathoustra, en fait. C'est un indice de plus sur sa totale mixité d'origines?)
Il est joué par Greg Chillin que vous aurez reconnu comme étant Owen de Being Human.

Avec lui, le jeune « Nico » (Niccolo), disciple/apprenti/souffre douleur/victime consentante des idées folles de son maestro Da Vinci qui nous plaît immédiatement avec ses mèches blondes, son innocence rare et sa loyauté inébranlable.
 
Pour finir le trio, voici un très bon personnage féminin: Vanessa, récemment échappée d'un couvent, amante occasionnelle, fille d'une fraicheur insoupçonnée, jouisseuse au caractère enjoué à qui on ne peut que souhaiter d'être heureuse.
Par ailleurs, elle bénéficie, d'une scène d'introduction très belle.


Comprenant que pour mener à bien sa quête, l'aventureux Leo a besoin d'alliés hauts placés, il se met rapidement au service de la famille dirigeante de la cité, les Médicis :
Soit, le tacticien colérique qu'est Lorenzo (Laurent le Magnifique joué par Elliot Cowan que vous avez peut être vu dans "Luther"), Clarice Orsini, son épouse digne et résolue (Lara Pulver: Irène Adler de la BBC!), et Guiliano, frère cadet de Lorenzo, sorte de Golden Boy qui vous étonnera, j'en suis sûre.

Tom Bateman, Guiliano, est réputé pour
avoir une coquetterie dans l’œil..
Je le voyez pas..et puis...


Désormais ingénieur officiel des banquiers qui craignent une guerre imminente avec Rome, Leo doit apprendre à concilier son désir d'émancipation et ses obligations envers Florence.




Je crois vraiment qu'ils ont essayé de faire des personnages complexes, ou du moins qui n’obéissent pas entièrement à leur "tropes", notamment en montrant des faiblesses et pas seulement pour les rondeurs de leurs concitoyen(ne)s.
Faute de toujours y parvenir avec tout le monde, la joyeuse bande ainsi constituée, qui se crie continuellement dessus (avant de coucher ensemble au gré de leurs interactions) en devient quand même vraiment attachante.

Avouez que je vous ai pas
menti sur ses expressions!

J'enchaine sur le second problème de la série : LUCREZIA.
Crée pour être un pivot central de l'histoire et le point de friction de tous les mâles du show, Lucrezia Donati, "love interest" par excellence, est basiquement ratée.
Mal jouée et mal écrite, elle ne possède que deux moues : aguicheuse, et «Keskisspass?!».
Son utilité, qui devrait être principale, finie noyée dans un masse informe de scènes de sexe où elle ne parvient pas à décider si elle aime...ou pas ce qui lui arrive.

Sa beauté et son esthétique de princesse tentatrice en font, hélas, un personnage dont le seul véritable intérêt est visuel.

Autre règle scénaristique à maitriser : tout ce qui ne vit pas à Florence est l'Ennemi : Celui qui terrifie les libres penseurs, les amoureux de toutes sortes, les artistes, les intellectuels.

Fais de ce Da Vinci l'un des nôtres
si ça t'amuses.
Hop! Une saison en 1 phrase!
En chef de file de cette dichotomie simpliste: Le Pape, ce pervers que la série s’évertue à nous montrer nu (pour notre plus grand inconfort), leader des forces réac de l'époque, assoiffé de pouvoir et toujours prêt à jeter ses sbires à l'assaut de la capitale toscane.

Et là, vraiment, il faut parler de l'un de ces derniers.
Je sais pas ce qui s'est passé.



Un trouble passager chez les recruteurs du casting ? Un projet psychanalytique de scénaristes en pleine crise existentielle? Un ancien personnage volé à HBO ? Un acteur de théâtre dans la dèche totale?

La conjonction de ces "erreurs dramatiques" pour la chaîne a crée un être pluridimensionnel, intelligent, émouvant, audacieux, qui possède et se sert de toute la gamme des émotions humaines : tantôt cruel, tantôt désemparé, parfois souriant et au contraire, hautain et grave le reste du temps.
Le tout porté par un acteur largement au dessus des autres : Blake Ritson, qui doit visiblement travailler pour manger.

Son Comte Girolamo Riario Della Rovere est un délice inattendu.
Je sais que je suis fascinée par les « bad guys » froids et calculateurs mais là, c'est pas ma faute, il y a consensus: Il est excellent en némesis de Leo.
Homme de main du Vatican, capitaine des services secrets, il ne recule devant rien pour imposer la volonté de Rome aux Médicis.

Ok, je le concède, c'est un personnage qui a une entrée de méchant, un costume de méchant et des répliques de méchant qui sont juste supposées vous rappeler de temps à autres qu'il est pas très net dans sa tête.
Mais pour tout le reste, il se dénote de la plupart des antagonistes que l'on rencontre dans ce type de série.

Son ambiguïté...intellectuelle... face à Leonardo est à souligner. C'est pas qui l'aime pas, hein, au contraire, ils se fascinent l'un l'autre. En miroir, si vous voulez.

Il n'a rien d'une machine, réfléchit consciencieusement aux problèmes que lui pose «l'Artista» Da Vinci, fait spontanéement preuve de gentillesse et de pitié pour peu que cela ne contrevienne pas à ses plans.
Et vous le voyez penser!
Ajoutons, de façon totalement superficielle, qu'il a une garde robe de malade et un uniforme cousu sur son corps, pour lequel je tuerais.
(Son uniforme! Pas son corps, bande de vicieux!)

Riario is bringing sexy back.
Ceci est un véritable costume de la
série.

Pour bien rendre justice au département des costumes, précisons qu'avec peu d'argent et, heureusement, sans obligation aucune de respecter une quelconque véracité historique, on retiendra qu'ils ont fait un job tout à fait enthousiasmant.
Je parlais plus haut de Lucrezia : Effectivement certaines de ses robes de cours sont magnifiques, quant à Riario...il est habillé entièrement en Armani.
Les photos de promo témoignent du désir évident de créer une "ambiance" plus ou moins bien maitrisée.

Derrière, le scénario peine à garder le cap. 
Vous pouvez avoir des épisodes où pas une scène ne passe correctement, d'autres, où les auteurs étaient visiblement sous ritaline (vous me ferez pas croire qu'ils étaient sobres en écrivant «The Devil») et encore d'autres qui sont de vraies petites réussites : Voyez «The Prisoner» dont la majeure partie se situe dans un couvent, façon enquête paranormale, et encore «The Tower» qui  présente, non sans un certain humour très "sous la ceinture", les mœurs du maestro.

Subsistent toujours de bons moments notamment en matière de camaraderie ou de dialogues bien sentis.

Je ne peux même pas affirmer que tout tient la route. Parce que ce n'est pas vrai. Evidemment, rien ne battra jamais les déductions de Sydney Fox en matière de facilité mais parfois, Leo est plus lent que nous à trouver une solution. Et sa façon de le faire...
D'autant qu'au cas où vous seriez en train manger un bout ou d'ouvrir la porte à votre coloc aviné, les petites indications visuelles et sonores vous permettront sans problème de voir où Da Vinci veut en venir! .


Reste que la série m'a accroché définitivement une fois commencée et, sa brièveté aidant (seulement 8 épisode dans la saison 1), vous vous  laisserez peut-être tenter en vacances ou lors d'un long week-end pluvieux.
Elle est aussi renouvelée pour une saison 2 prévue dès 22 mars 2014  dont vous pouvez voir le trailer ici.
Ce qui est une bonne chose car les séries de la Starz ont une particularité: comme les auteurs écoutent avec beaucoup d’intérêt les réclamations de leur public, ils améliorent d'année en année leur création.


La « WTF factory » :
(car les séries de ce type méritent qu'on commente certains détails plutôt qu'on étudie le CV des acteurs).

- Comment Nico est-il redescendu de là-haut dans le pilot ?
"Tu voles Nico!!! Oh mon Dieu! Tu tombes Nico! Tu tooooooombes!!!"

- Nico...c'est Machiavel ? ...Quoi !?

- Pourquoi tous les gens peints ou dessinés sont si ratés ? C'est pas une grosse insulte au dessinateur de l'homme de Vitruve, ça?

*De Vinci se retourne dans
sa tombe*
- J'ai rien contre la salle de bain du Pape, mais..pourquoi il ne cesse d'y avoir des entrevues avec ses subalternes ? Il y a pas des endroits plus adaptés ?

-Si les «Sons of Mithras» sont si intelligents et habiles, pourquoi est ce qu'ils cachent des trucs dans endroits si évidents? Une fois, j'ai fait une chasse au trésor pendant une boom et c'était plus dur!

-Qui pompe l'air pendant le retour du scaphandrier? Comment savent-ils qu'il faut se remettre à pomper?

Ne me dites pas que vous ne voyez pas les
signaux dans la tête de Riario qui font
"Abort! Abort! Abort"
-Pourquoi Lucrezia prend la route où elle sait qu'elle va être surprise en flagrant délit? Et pourquoi se cache t'elle alors que son alibi est parfait ?

-Dracula? Vraiment ?! Dracula?

-Le final de la saison bien que plutôt bien amené niveau «scénar» est en passe de devenir culte pour moi : Votre mission si vous l'acceptez est de détecter un seul acteur qui ne surjoue pas la séquence de l'église!
-Entre la mort parfaitement emphatique.de Guiliano, pauvre couillon qui a survécu à son coup de poignard pour se faire empaler à l'épisode suivant,
-La réaction de Vanessa :"Je suis enceinte".."oui c'est merveilleux mon amour mais va chercher du secours plutôt, je pisse le sang!".
-Le fait qu'elle l'étouffe littéralement en s'effondrant de chagrin sur lui. (Il n'est pas encore mort!)
-L'autre Lucrezia qui intensifie son regard de terreur jusqu’au claquage facial alors qu'elle est en position de pouvoir fuir sans aucun problème.
-Puisque Riario l'a proprement déposée sur un banc afin d'aller hurler comme un possédé sur la porte! (Oui les gardes, tout ça...)
-Et qu'à l’intérieur, Lorenzo le-cocu- magnifique promet sadiquement la mort à celui qui est en train de compresser sa jugulaire tranchée...
- Ce faisant, Da Vinci, dernier rempart entre le Medicis éructant et la Grande Faucheuse, s'applique à imiter la belle Lucrezia dans un concours d'expressions inadaptées. Culpabilité, étonnement, incompréhension, léger AVC? "Kesskisspass?"
J'ai vu cette séquence au moins 10 fois!

Dernier gif de Leo et Riario, choisi totalement par hasard,
et ne prêtant à aucune interprétation freudienne de leur intérêt commun.

J'abuse un peu c'est vrai: Boss et the White Queen
sont des séries de la Starz et plutôt bonnes!
Drac.

1 commentaire:

  1. Le truc c'est que maintenant j'en sais tellement sur cette série que je vais avoir du mal à me laisser tenter ...
    (Par contre, la robe rouge est magnifique !)

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